Qu’est-ce qu’une vague de chaleur?

Au Canada, il n’y a pas de définition formelle d’un épisode de vague de chaleur, alors que les critères utilisés pour déclencher un avertissement de chaleur accablante varient pour chaque province ou territoire. 

Toutefois, une vague de chaleur se définit habituellement comme une période d’au moins deux jours consécutifs, pendant laquelle les températures sont exceptionnellement chaudes. Ces températures sont qualifiées d’exceptionnelles lorsque leurs niveaux minimal (habituellement les températures de nuit) et maximal (habituellement les températures de jour) dépassent les moyennes historiques. 

Environnement Canada définit la chaleur et l’humidité comme importantes lorsqu’on prévoit des températures extérieures de plus de 30 °C et des valeurs humidex supérieures à 40 degrés. L’indice humidex a été mis au point pour décrire à quel point l’air semble chaud ou humide pour un être humain.

Lorsqu’on on parle de chaleur accablante, est-ce qu’on parle de vague de chaleur nécessairement?

Oui on parle de la même chose. Le terme vague de chaleur a surtout été utilisé au tout début, car il définissait une situation météorologique, mais avec le temps le terme chaleur accablante est apparu pour mettre l’emphase sur les risques encourus lors de ce type de situation météorologique. On emploie aussi parfois le mot canicule et chaleur extrême, en particulier dans les médias.

La chaleur accablante, est-ce dangereux?

Lors d’une vague de chaleur, les températures élevées peuvent avoir des impacts négatifs sur la santé physique et mentale de la population, il ne s’agit pas seulement d’une question de confort. La chaleur accablante est associée à un excès de mortalité. Elle entraine plusieurs effets nuisibles sur la santé, comme la déshydratation, les crampes, les évanouissements, l’épuisement, les coups de chaleur, l’aggravation de l’état de santé des personnes malades, et même la mort.  

À l’été 2021, en Colombie-Britannique, on ne compte pas moins de 619 décès liés à la chaleur. Quatre-vingt-treize pourcent d’entre eux ont eu lieu la semaine du 25 juin au 1er juillet seulement, alors que le mercure est monté jusqu’à 49,6° degrés Celsius dans le village de Lytton.

Est-ce que tous les Canadiens sont pareillement exposés aux vagues de chaleur au Canada ou dans une même ville?

Non, bien que les vagues de chaleur affectent tout le monde, y compris les personnes en bonne santé, les risques sont plus importants pour les populations déjà vulnérables ou moins aptes à se protéger. Cela inclut les personnes les plus exposées à la chaleur extrême comme les personnes travaillant ou étant physiquement actives à l’extérieur, les personnes les plus sensibles comme les aînés, les jeunes enfants, les femmes enceintes ou les individus souffrant de maladies chroniques ou de maladies mentales et les personnes ayant le moins de ressources pour s’adapter comme les individus à faible revenu.

Qu’est-ce qu’un îlot de chaleur urbain?

Les îlots de chaleur urbains (ICU) sont des zones urbaines où les températures sont plus chaudes que dans les zones rurales et naturelles environnantes. Normalement, cette différence est de quelques degrés, mais peut atteindre jusqu’à 12 degrés Celsius dans certains secteurs de la ville, comme les aires de stationnement asphaltées. À l’inverse, cet écart tend à être plus limité dans les parcs et les espaces verts.

Les surfaces bâties comme les toits, les routes pavées et les parcs de stationnement peuvent absorber de grandes quantités de chaleur rayonnante du soleil et ainsi faire grimper les températures de surface et de l’air. À cela, s’ajoute le fait que dans les villes le couvert végétal est habituellement moins présent, diminuant ainsi grandement l’évaporation à partir de la végétation. Ce dernier point est important, car la chaleur présente dans l’air au lieu de servir à évaporer l’eau présente dans les végétaux sert plutôt à augmenter la température de l’air ambiant. C’est en quelque sorte un détournement de l’utilisation de la chaleur en ville qui fait grimper les températures de l’air.

Un autre facteur contribue à l’augmentation de la chaleur : la taille et la morphologie des villes. En effet, on observe une plus faible circulation de l’air dans les quartiers caractérisés par de grands immeubles et des bâtiments collés les uns aux autres. Les activités humaines comme les industries, l’utilisation des voitures et la climatisation (à cause de la chaleur dégagée par la thermopompe située à l’extérieur du bâtiment) contribuent également à l’intensification du phénomène.

Quelle est la différence entre une vague de chaleur et un îlot de chaleur urbain?

La présence d’un îlot de chaleur est directement reliée aux caractéristiques du milieu de vie (ex : sol imperméabilisé, présence de surface sombre comme le bitume, etc.). Alors que la vague de chaleur est un phénomène atmosphérique au même titre que les autres phénomènes atmosphériques comme de fortes précipitations. De surcroît, pour les îlots de chaleur, il y a cette notion de différence de température entre l’environnement urbain et l’environnement plus rural (et naturel) qu’on trouve en périphérie.

Qu’est-ce que la sensibilité?

La sensibilité recoupe des conditions qui contribuent à augmenter la vulnérabilité des personnes ou des infrastructures. Dans l’évaluation de la sensibilité, nous avons considéré plusieurs variables socio-économiques, démographiques et des variables relevant de l’environnement bâti. Ainsi, si vous êtes une personne âgée vivant seule ou une famille avec de jeunes enfants vivant dans un logement nécessitant beaucoup de réparations, vous avez une condition qui vous rend particulièrement vulnérable si une vague de chaleur survenait

Variables retenues pour construire l’indicateur de sensibilité
Proportion de personnes d’âges sensibles (≤ 4 ans et ≥ 65 ans) (%)
Proportion de personnes n’ayant aucun diplôme, certificat ou grade (%)
Proportion de personnes immigrantes récentes (%)
Proportion de personnes ne connaissant pas une langue officielle (%)
Proportion de personnes vivant seules (%)
Proportion de familles monoparentales (%)
Proportion de logements loués (%)
Fréquence du faible revenu fondée sur la Mesure de faible revenu après impôt (%)
Proportion de locataires consacrant 30 % ou plus du revenu du ménage à l’habitation (%)
Proportion de logements nécessitant des réparations majeures (%)
Proportion de résidences avec 5 étages ou plus (%)
Proportion de logements construits avant 1980 (%)
Que signifie être capable de faire face?

La capacité à faire face recoupe des conditions qui contribuent à diminuer la vulnérabilité des personnes ou des infrastructures. Dans l’évaluation de la capacité à faire face, nous avons considéré uniquement des variables de proximité à certains services. Nous aurions aimé ajouter une plus grande diversité de variables comme dans le cas de la sensibilité, mais malheureusement les variables de capacité à faire face sont encore peu ou pas disponibles à l’échelle du Canada et à une résolution spatiale suffisamment fine. Ainsi, si votre famille est située près de certains services de proximité comme une piscine publique ou une bibliothèque municipale, vous êtes considéré comme étant moins vulnérable si une vague de chaleur survenait. Voici le tableau qui présente la liste des services de proximité.

Liste des services de proximité 
Piscines et jeux d’eau
Parcs
Centres communautaires
Plages
Hôpitaux
Galeries
Librairies
Musées et installations artistiques
Centres commerciaux
Cinémas
Que signifie la vulnérabilité?

La vulnérabilité est la résultante de l’indice de sensibilité et de celui de la capacité à faire face aux vagues de chaleur. Dans un premier temps, pour chacune des aires de diffusion des grandes villes du Canada, nous avons mesuré la différence entre ce qui rend les populations moins vulnérables (valeur de l’indice de la capacité à faire face) et ce qui rend les populations plus vulnérables (valeur de la sensibilité). Par la suite, la vulnérabilité a été cartographiée après que la différence de la sensibilité et de la capacité à faire face ait été mise en classes. Ce type de cartographie a été inspiré par l’indice de défavorisation matérielle et sociale de Robert Pampalon et Guy Raymond (2003).

Pourquoi devrais-je me renseigner sur la vulnérabilité dans mon quartier?

Il est reconnu qu’une meilleure connaissance de son environnement socio-économique, bâti et des services de santé à proximité de son secteur résidentiel est souvent synonyme d’une plus grande capacité à faire face et d’une plus faible sensibilité en cas de catastrophes. Par exemple, en situation de canicule, vous pourriez être plus attentif à votre voisinage si vous savez qu’un nombre important de personnes âgées de plus de 65 ans et de personnes vivant seules y vivent et que les services de santé ne sont pas disponibles à proximité. 

Une fois que je connais la vulnérabilité de ma région, que dois-je faire?
  • Vous pourriez d’abord discuter de vos constatations avec vos proches ou vos voisins afin de permettre la sensibilisation d’un plus large auditoire à la situation de votre quartier.
  • Cherchez à identifier un maximum de ressources qui pourraient vous être utiles advenant une vague de chaleur (piscine, lieu public climatisé, voisin équipé de climatisation, etc.).
  • Interpellez vos élus municipaux afin que ceux-ci prennent en compte les caractéristiques du milieu dans l’élaboration de projets d’aménagement.
Comment a-t-on construit ces cartes?
  1. Pourquoi avoir initié ce projet?
    Ce projet a été initié par le département de géographie de l’Université Laval et financé par le Défi d’offre de logement de la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL) dans le cadre de la stratégie nationale sur le logement.L’objectif de ce projet de recherche est d’élaborer une application cartographique interactive en ligne fournissant des informations valides sur la distribution géographique de la vulnérabilité et de l’exposition des populations et des logements des principales communautés canadiennes aux vagues de chaleur accablantes, en spécifiant, pour chaque unité géographique (à fine échelle), l’intensité ce cette vulnérabilité. Ces outils permettent, selon nous, de rendre accessibles publiquement des informations signifiantes et propres au contexte de l’analyse géographique de la vulnérabilité des communautés vivant dans les grandes agglomérations canadiennes.
  2. Pourquoi avez-vous choisi de considérer uniquement les 156 RMR et AR et non pas toutes les villes canadiennes?
    Parce qu’en 2021, près des trois quarts de la population canadienne habitaient dans un de ces grands centres urbains. « Selon le Recensement de 2021, 84 % de la population du Canada vit dans une RMR ou une AR. Cela représente plus de 31 millions de personnes. Plus de la moitié de la population, soit un peu plus de 20,5 millions de personnes, vit dans les dix plus grandes RMR ».C’est également dans les RMR et les AR qu’on retrouve les zones les plus densément peuplées et anthropisées. C’est donc à ces endroits que le phénomène des îlots de chaleur urbain est le plus important.
  3. Au fait, qu’est-ce qu’une RMR et une AR?
    Selon Statistique Canada, « une région métropolitaine de recensement (RMR) ou une agglomération de recensement (AR) est formée d’une ou de plusieurs municipalités adjacentes situées autour d’un centre de population (aussi appelé le noyau). Selon les données du Programme du Recensement de la population actuel, une RMR doit avoir une population totale d’au moins 100 000 habitants, et son noyau doit compter au moins 50 000 habitants d’après les données ajustées du Programme du Recensement de la population précédent. Quant à l’AR, son noyau doit compter au moins 10 000 habitants toujours selon les données du Programme du Recensement de la population précédent. »
  4. Comment avez-vous choisi les variables qui servent à évaluer la vulnérabilité?
    La sélection des variables pour la construction des indicateurs s’est effectuée en plusieurs étapes. Une partie du travail a été réalisée préalablement lors du projet de l’Atlas de la vulnérabilité de la population québécoise aux aléas climatiquesTout d’abord, nous avons effectué une large recension des articles scientifiques qui calculaient des indices de vulnérabilité aux vagues de chaleur. Cette étape nous a permis d’identifier les indicateurs qui sont généralement utilisés pour estimer la vulnérabilité. Dans une deuxième étape, les variables retenues lors de cette recension ont été mises en relation avec les variables qui ont été identifiées par des professionnels de l’aménagement du territoire au moment de la tenue d’une enquête que nous avons menée. Enfin, à la troisième étape, nous avons identifié les indicateurs pour lesquels les données étaient réellement disponibles pour toutes les régions urbaines du Canada et offrant la meilleure résolution spatiale possible.
  5. Pourquoi avoir utilisé les aires de diffusion comme délimitations géographiques?

    Une partie importante des indicateurs utilisés dans le calcul des indices sont issus du recensement canadien de 2021. Une aire de diffusion est une petite unité géographique qui regroupe de 400 à 700 personnes et pour laquelle nous avons ces données. Il s’agit de la plus petite région géographique normalisée pour laquelle toutes les données du recensement sont diffusées. Le principal avantage associé à l’utilisation de ce découpage est son niveau de finesse sur le plan spatial.

  6. Peut-on faire confiance à ces résultats?
    Les données utilisées pour calculer les indicateurs de bases ont un niveau de fiabilité très élevé et la méthode utilisée pour calculer les indices a subi un important processus de validation avant d’être diffusée. Cependant, il serait présomptueux d’affirmer que ces cartes réussissent à décrire la totalité d’un phénomène aussi complexe que la vulnérabilité et l’exposition aux vagues de chaleur accablante des populations vivant dans les villes canadiennes. Ces cartes ont surtout comme objectif de décrire la distribution géographique des inégalités sociales, économiques et environnementales face à cet aléa.
Comment avez-vous réalisé la carte des îlots de chaleur?

Dix (10) indicateurs ont été utilisées pour la production de la carte des îlots de chaleur. Quatre d’entre-eux, soit la température du sol, l’indice de végétation (NDVI) et l’indice du cadre bâti (NDBI) sont issus d’images satellitaire Landsat 8, alors que le pourcentage d’imperméabilité du sol a été calculé via un algorithme d’intelligence artificielle. Les images de températures du sol acquises correspondent à des journées où la température de jour est supérieure à 30 °C. Les autres variables calculées dans le but de modéliser la distribution géographique des îlots de chaleur dans notre zone d’étude sont la latitude, la longitude, l’altitude ainsi que trois (3) indicateurs de proximité à un plan d’eau.

Une fois les indicateurs estimés à l’aide d’un système d’information géographique (SIG), une méthode d’apprentissage machine supervisée connue sous le nom de forêts aléatoires a été utilisée dans le but de prédire la différence de température d’un pixel par rapport à la valeur moyenne des températures d’un groupe de référence de pixels localisés dans un milieu non urbain se situant à proximité. Un fois l’algorithme entrainé sur un échantillon de pixels puis les résultats validés à l’aide d’un second échantillon indépendant, la démarche analytique nous a permis de produire une prédiction de la température relative pour la zone couverte par les données. 

Les résultats cartographiques issus de la modélisation ont fait l’objet des deux traitements distincts dans le but de représenter cartographiquement le phénomène. Dans un premier temps, une mise en classes des valeurs prédites de température relative a été effectuée sur les pixels chevauchant la zone couverte par le modèle. Un tuilage matriciel a été appliqué sur la couche matricielle de données avant que celle-ci ne soit intégrée dans une carte web. La seconde démarche de cartographie des résultats fut d’agréger par la moyenne les valeurs prédites de température relative aux zones habitées des aires de diffusion de Statistique Canada. Les données vectorielles ont par la suite fait l’objet d’une mise en classe par quintiles avant d’être implémentée dans une cartographie web.

Qu’est-ce que l’analyse multidimensionnelle de la vulnérabilité et de l’exposition?

L’analyse multidimensionnelle de la vulnérabilité et de l’exposition aux vagues de chaleur est une carte bivariée où il est possible de voir les résultats des deux indices simultanément. Par exemple, une aire de diffusion peut avoir une vulnérabilité moyenne, mais une exposition élevée.

Qu’est-ce que les cartes ne disent pas?

Ces cartes ne permettant pas d’évaluer le risque de survenue d’une vague de chaleur sur votre territoire. Elles permettent plutôt d’identifier des groupes de personnes qui pourraient être plus vulnérables dans votre voisinage si cela se produisait ainsi que les secteurs de la ville qui seraient plus exposés.